Récits SESQUI : Nyla Innuksuk

PINNGUAQ – VOLET NUMÉRIQUE / RÉALITÉ VIRTUELLE DE SESQUI

Le Canada et la célébration du 150e anniversaire du Canada peuvent provoquer un peu d’inconfort, mais ce n’est pas grave. Je pense en fait que cela suscite un dialogue et soulève des questions importantes. Je vois le Canada et la célébration de son anniversaire, son cent cinquantenaire, comme une sorte de célébration coloniale.

Le Canada est mon pays, mais quand je pense à la place que j’y occupe, vous savez, pour moi, ce sont deux mondes qui se mélangent. Je viens du Nunavut, qui est très respectueux des traditions, comme la chasse au phoque, le chant guttural et notre danse du tambour qui demeurent extrêmement importants. Et puis j’habite aussi dans la région de Toronto, alors je vis comme une personne autochtone en milieu urbain. Je suis un peu entre deux mondes et je pense que c’est le cas pour plusieurs personnes à l’heure actuelle.

Les peuples autochtones sont un peu mal à l’aise avec les célébrations du 150e anniversaire du Canada. Je ne dis pas que nous ne sommes pas fiers de nos racines, mais leur signification peut varier d’une personne à l’autre. C’est ce qui est vraiment intéressant. C’était sensationnel de pouvoir découvrir les deux facettes du Canada et ce qu’elles signifient pour chacun. Aussi, l’expérience du Nunavut et des Inuits est totalement différente de celle des communautés des Premières Nations et des Métis au Canada. Alors, l’utilisation du format 2D n’était pas idéale pour présenter les réflexions personnelles des Canadiens et des Canadiennes sur ce que le Canada représente pour eux. Par contre, avec la technologie 360 et AV, on a l’impression de partager leur perspective, comme si on y était (vivre l’expérience virtuelle de SESQUI). Pour moi, c’est très emballant.

Ce qui est merveilleux avec la réalité virtuelle et la réalité augmentée à 360°, c’est que ce médium est tout nouveau. Ce n’est pas vraiment un jeu vidéo ni un film. C’est une nouvelle manière de raconter des histoires qui ne connaît pas de limites. C’est très stimulant de pouvoir travailler avec beaucoup d’artistes incroyables qui ne sont pas nécessairement des concepteurs de jeux ou des cinéastes, mais des musiciens et des artistes visuels pour créer quelque chose de vraiment unique. C’est pourquoi j’aime tellement ce projet SESQUI! Nous avons la chance de travailler avec un groupe diversifié de personnes provenant de différentes sphères artistiques.

Cette technologie est beaucoup plus efficace pour communiquer les émotions et vous présenter une perspective. Nous ne sommes pas simplement des spectateurs passifs. À la différence des contenus en 2D, l’expérience à 360 degrés ou l’expérience de réalité virtuelle immersive permet aux spectateurs de vivre l’expérience comme s’ils y étaient. C’est une façon de recadrer ce qui se passe autour de nous. Comme Autochone, cette expérience a été très enrichissante. Je travaille beaucoup dans les communautés autochtones, y compris chez moi, au Nunavut, et ce que j’ai aimé de votre film, c’est que vous avez réussi à nous transporter jusqu’au Nunavut pendant un court moment, alors que c’est un endroit qui n’est pas facilement accessible. Je peux tenter tant bien que mal d’expliquer la beauté de la toundra ou des fjords, mais c’est une autre chose de permettre aux gens de s’immerger dans cet environnement et de voir une autre région du Canada à laquelle ils n’auraient pas accès autrement.

Ce qui me passionne le plus, c’est le petit côté inexploré de la production. Il est évident que nous n’avons pas toutes les réponses. Quand une personne nous demande de faire quelque chose que l’on croit impossible, c’est incroyable de se réunir avec ses amis et découvrir qu’en fait, c’est tout à fait possible. C’est merveilleux de penser que la plupart du temps, le travail que nous accomplissons n’a jamais été accompli auparavant. Pour moi, c’est très emballant.

Le fait que cette technologie soitnouvelle signifie qu’il est impossible de tout faire tout seul. Il faut travailler en équipe. Nous sommes tous appelés à faire part de nos connaissances parce que c’est la seule façon pour nous de progresser dans notre propre travail, mais aussi de travailler comme une communauté pour rendre les médiums de la réalité virtuelle et du 360° viables.

En gros, les technologies que nous utilisons actuellement nous unissent en quelque sorte et, selon moi, c’est une bonne chose. Au sein des communautés de réalité virtuelle, je parle avec des gens de partout dans le monde, mais le cercle de gens est encore assez restreint alors il faut dépasser les frontières pour voir ce que les autres font. Je vois le Canada et le reste du monde à l’heure de la mondialisation et je pense que la technologie et l’accès à d’autres opinions et cultures, de manière virtuelle ou réelle, changeront un peu la donne. Idéalement, j’espère voir évoluer la façon dont les gens travaillent ensemble.